Interview



Entre deux trains, avions, bus ou n'importe quel autre moyen de locomotion susceptible de le mener d'une scène à une autre, Thomas Fersen n'arrête pas. Il chante Louise, le Bal des Oiseaux et les titres de son dernier album "4" (Tôt ou Tard). De retour du Canada, le conteur s'apprête à nouveau à faire le tour de France. Rencontre avec un chanteur pressé qui sait prendre son temps.

Paunet : Vous rentrez d'une tournée au Canada, comment sont accueillies vos chansons là-bas ?
Thomas Fersen : C'est assez différent d'ici. Au Canada, ils ont les Etats-Unis en face. La francophonie est une grosse affaire là-bas. En France, les gens ont moins conscience d'appartenir à une tribu d'indiens. Ici, c'est différent, tout le monde parle français.

Paunet : Pourquoi avoir intitulé votre quatrième album "4" ?
Thomas Fersen : C'est une idée du photographe J.B. Mondino qui me disait "entre le bal des oiseaux, les ronds de carotte ou le jour du poisson, on ne sait pas très bien où tu en es". Quatre, c'est un signe, un repère. Mondino a un point de vue extérieur, il est de bon conseil. (sourire)

Paunet : Au fil de ces albums et de ces chansons, vous avez construit un univers assez personnel.
Thomas Fersen : ça c'est fait petit à petit. Il y a toujours un personnage tout au long de l'album. Là ( ndlr : dans 4), il est plombier, chauffeur d'un serial killer, moucheron, tient la chandelle, il vit plein d'histoires. Tout ça vient de la vie. La mienne, celle des autres. J'observe beaucoup, c'est un réflexe. J'enregistre les traits de caractères. Mes chansons sont donc un peu autobiographiques, mais il y a d'autres influences comme les gens et les livres.

Paunet : comment vous définiriez vous ?
Thomas Fersen : Peintre ! Je fais des chansons cocasses. C'est le monde vu par ma petite fenêtre.

Paunet : Il est beaucoup questions d'animaux dans vos chansons ?
Thomas Fersen : Il s'agit juste d'une imagerie pour peindre les caractères. Nous avons tous les clefs de cette imagerie. Cela permet de dresser les caractères rapidement et d'être compris par tous. J'aime raconter des histoires, des petites scènes de la vie quotidienne qui sont, en même temps, intemporelles. C'est une victoire sur le temps et c'est ma madeleine de Proust.

Paunet : Côté musique, qu'aimez-vous ?
Thomas Fersen : J'aime le folklore quand il est utilisé par d'autres, un peu comme font Joseph Racaille ou Brastch. Tous ces trucs comme la musique orientale, j'aime retrouver ça chez d'autres. Sinon, j'essaye de me détacher des autres, de ne pas me laisser influencer. Je pense que je décortique beaucoup les chansons. Mais je peux être touché par la simplicité de certaines musiques, comme par exemple les vieux morceaux de Michel Simon ou Bourvil.

Paunet : Qu'est-ce que vous faîtes quand vous ne travaillez pas ?
Thomas Fersen : Oh ! Je suis toujours en train d'observer quelque chose, ce qui me donne souvent l'air distrait. Je me ballade, je joue à la belote, je lis.

Paunet : beaucoup ?
Thomas Fersen : Oui et de tout ! J'ai environ deux milles bouquins chez moi. Je suis un boulimique de lecture. Je lis dans le train, en voiture. J'ai toujours un livre sur moi. Cela me permet de me retrouver. En lisant, j'apprends toujours des choses sur moi. Cela fait du bien quand on est exposé de se retrouver. Je lis souvent plusieurs livres en même temps. Quand j'ai un gros pavé en cours, j'ai souvent un petit bouquin à côté. C'est pour ne pas me laisser dévorer par une histoire et la lire à toute vitesse sans faire attention à l'écriture. Et puis, il ne faut pas appartenir à un seul auteur.

Paunet : Vous sortez un album tous les deux ans.
Thomas Fersen : Le prochain sera en public, ce qui mettra un écart avec le suivant qui sera en studio. Je ne sais pas ce que je vais faire de tout ce temps. Je vais peut-être m'emmerder. Ou prendre des vacances.

Nahon Eric
PauNet
 Octobre 2000